
(Xinhua/Kepseu)
YAOUNDE, 25 mars (Xinhua) -- Pour beaucoup, il s'agissait de leur dernière vision de l'Afrique.
Poussés à travers la tristement célèbre "Porte du non-retour", des milliers d'Africains ont été embarqués depuis le port des esclaves de Bimbia, situé à Limbé, une ville côtière de la région camerounaise du Sud-Ouest, vers une vie d'esclavage en Amérique.
Depuis ce site construit par les Européens, la vue est pittoresque : des bateaux de pêche se balancent doucement sur les vagues, tandis qu'une plage bordée de mangroves s'étire à perte de vue. Pourtant, cette quiétude masque une histoire profondément sombre. Le port des esclaves de Bimbia a été, du XVIIe au XIXe siècle, l'une des plaques tournantes les plus importantes des négriers en Afrique.
Les Africains réduits en esclavage, capturés dans les terres, y étaient emprisonnés dans des cachots insalubres pendant des semaines, voire des mois, dans l'attente des navires négriers. Mbimbi Edimo, guide du site depuis plus d'une décennie, témoigne de l'horreur de ces conditions, les qualifiant d'absolument inhumaines.
"Environ 100 à 200 esclaves enchaînés étaient entassés dans un espace sombre et étouffant", raconte l'homme de 38 ans. "Les cachots étaient immondes. Beaucoup sont morts".
Au-dessus des captifs enchaînés, dans les étages supérieurs du fort, les geôliers se rassemblaient pour prier dans une chapelle. "Les maîtres esclavagistes, après avoir prié Dieu dans l'église située à l'étage, descendaient dans les cachots pour infliger des tortures, commettre des meurtres et abuser des femmes. Un contraste saisissant", déplore M. Edimo avec tristesse.
Autrefois couvert de matières fécales, de vomi, d'urine et de sang menstruel, le sol de pierre est aujourd'hui silencieux et le site est devenu un lieu sacré de mémoire. Il porte encore les traces de la traite négrière, comme les chaînes et les cachots où les esclaves étaient retenus.
D'après un reportage de France 24, de l'autre côté de l'Atlantique, plus de 8.000 Afro-Américains ont retracé leurs origines jusqu'au Cameroun. Leurs ancêtres auraient très probablement quitté le port des esclaves de Bimbia.
Depuis quelques années, les Afro-Américains se rendent régulièrement sur ce site pour renouer avec leurs ancêtres vendus en esclavage. Alors que le monde commémore mardi la Journée internationale de commémoration des victimes de l'esclavage et de la traite transatlantique des esclaves, les autochtones de Bimbia continuent de mesurer l'inhumanité de l'esclavage et tiennent à préserver ce site historique de la traite négrière.
Enanga Njuku, originaire de Bimbia où elle a vu le jour et passé son enfance, réside aujourd'hui à environ un kilomètre du site historique de la traite négrière. "Le patrimoine de la traite négrière de Bimbia fait partie de l'histoire, c'est une tradition. Il est à la fois historique et spirituel. Il signifie beaucoup pour nous", confie la femme de 81 ans qui, dans sa jeunesse, mettait en scène des pièces de théâtre évoquant le destin tragique des esclaves pour les touristes venus découvrir le site.
"Chaque fois que j'interprétais mon rôle, c'était très émouvant, car cela nous rappelait la souffrance de nos ancêtres", ajoute-t-elle. Fin

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